Multatuli.online

Lijst van brieven op datum

2 juli 1866

van

Multatuli

aan

Tine Douwes Dekker-van Wijnbergen (bio)

 

Volledige Werken. Deel 11. Brieven en dokumenten uit de jaren 1862-1866 (1977)

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* 2 juli 1866

Brief van Multatuli aan Tine. (Brieven VII, blz. 81-86; Brieven WB VII, blz. 70-73)

K.: de familie Koning.

Garibaldi: met zijn vrijheidsscharen oprukkende tegen de pauselijke staat Rome, werd Garibaldi in 1862 bij Aspromonte door het leger van de italiaanse koning tegengehouden en zwaar gewond; toch nam hij in 1866 met een troep vrijwilligers deel aan de oorlog van Italië tegen de Oostenrijkers.

Coblenz, 2 Juli.

Lieve beste dappere Tine. Ja, vader zou zeker zeggen dat je een Kenau was! Wel wat zat ik te kyken by dien brief! Er was een klein briefje by van Siet waarin stond dat je al vertrokken was. Dus op 't oogenblik al zoo'n eind weg. Ja, je hebt heel goed gedaan my geen geld te zenden. Ik ben toch al bang genoeg dat je te kort komt, daar Edu mee gaat en ik vrees dat je de kosten niet goed berekend hebt. Edu zal overal voor vol persoon gelden. Ik zal niet gerust wezen voor ik je aankomst hoor. Ik begryp niet goed watje schryft over Edu in Genua en de hulp van Potgieter, maar dat zal zich later ophelderen. Ik ben bly dat hy meegegaan is (anders had het toch ook niet wel gekund) hy kon toch niet altyd by K. blyven. Later zal ik zeker meer byzonderheden hooren. Ik ben vooral nieuwsgierig hoe je met het plan (!!!) van van Vloten staat.

Wat is het heerlyk lief van Stéfanie en van Omboni. Je zult opfrisschen in die omgeving en ook voor de kinderen is 't goed. Ik ben erg benieuwd wat het is dat je in 't zigt hebt voor Edu, en ook of je geldje toereikend was om die hele reis te maken. Mimi vreest zoo dat je tekort komt. Wy rekenen al uit zooveel wy weten en dan zou je tot Lyon al fr. 180 kwyt zyn alleen voor spoor. Zonder eenige vertering of fooi of logies. Nu van Lyon is 't nog ver! En je hadt zeker voor je vertrek uit Amsterdam ook nog uitgaven. Ik ben erg ongerust.

Je begrypt hoe graag ik nu vooral naar Garibaldi wou. Maar om er te komen! En om er een beetje fatsoenlyk aan te komen! Zooveel mogelyk lees ik de courant. Tot nu toe schynt er niets van veel belang door hem uitgericht te zyn en ik vrees... Wacht, ik zal frans schryven dan lees je 't misschien voor.

Je crains que Garibaldi et en même temps la grande cause de l'Italie ne soit sacrifié. Il y a des choses qu'on voit mieux de loin que de prés. Garibaldi a été fait général, on l'a enrégimenté, on lui a mis sur les épaules le joug écrasant de la routine officielle, on lui a donné des instructions, absolument comme à d'autres qui mangèrent depuis vingt ans le pain des casernes... tout cela ne lui va pas, lui qui est simplement héros et homme de coeur. Un génie attelé ne valut jamais rien. Je comprends parfaitement qu'il a accepté les conditions que la soit disant politique du cabinet Italien lui a posées sous peine de contre carrer ses projets et de déclarer traître à la patrie celui qui se permettrait de prendre Vénise et de chasser les Autrichiens sans suivre les instructions de l'art. On aura dit: ‘de par le roi défense au génie de faire aucun miracle.’

Pour Garibaldi la prise de Vénise aurait été tout simplement le problème (si c'en est un) de la distance entre deux points. ‘Mais c'est la ligne droite!’ aurait-il dit. Moi ici. Vénise la bas... allons-y! Et de vaincre ou de mourir! Même en succombant il aurait servi la cause de l'Italie. Le sang d'un héros comme lui est fécond! La jeune Italie se serait senti aiguillonnée, et le cri: ‘un tombeau pour lui à Vénise, à Rome pour lui un mausolée’ aurait été le ‘Dieu le veut!’ d'une terrible croisade!

Et maintenant? Hélas! Le grand homme bronchera à chaque instant sur le chemin inaccoutumé qu'on lui a ouvert. Les misérables entraves d'une très scientifique, très académique (et très ridicule) stratégie le feront trébucher, et à l'heure qu'il est, Dieu sait combien de caporaux se seront apperçu déja que le tant vanté héros ne connait pas le premier mot de l'école de peloton (l'a b c des soldats de parade.) La simplicité du génie ne se fera jamais aux rigides exigences d'une science pleine d'artifices, inventée pour remplacer le génie. Victor Emanuel, obéissant à une fatale pression extérieure, je le sais bien, s'est vu obligé de mettre la tonnerre en bouteilles et d'en verser petit à petit une goutte à l'ennemi... tandis que Garibaldi libre aurait écrasé les adversaires soit en triomfant directement, soit en sacrifiant sa vie pour vivifier l'audace des siens.

Pallavicini sous ses ordres? Je n'en crois rien. Je crois plûtot que Pallavicini qui a fait ses tristes preuves de loyauté à Aspromonte lui a été donné comme étouffoir... voire même comme espion. Ne se pourrait-il pas que le héros se sentit pris d'un de ces coups de tête qui prennent des royaumes? Et ne faut-il pas que ces choses soient faites selon les règies de l'art? Ne faut-il pas qu'il y ait un peu de Lamarmora, et un peu du prince... un tel, ou un peu du ministre un tel, dans les affaires d'éclat? Quelle honte pour les budgets de la guerre passés, présents et à venir, si un héros fit les choses mieux que les généraux qui depuis tant d'années ont été payés pour les faire.

Rien n'y fait que les héros ne reculent pas, et que les généraux reculent (voir le Hanovre, le Saxe, la Hesse et toutes les campagnes. Partout il y a 20 ou 50 généraux qui reculent ou qui se rendent contre un qui se fait tuer.) Cela n'y fait rien, pourvu que les dignités officielles se portent bien! Périsse plûtot la grande cause de l'Italie, que de voir encore les grandeurs incomprises de l'état major devancées par eet intru! On lui fera payer cher la prise de Naples, et sa gloire et son génie, et sa simplicité, et son ignorance... Je maintiens qu'on le sacrifie. J'espère que bientôt une balie autrichienne compatissante le sauvera du dégoutant mépris des petites gens qui s'appercevront bientôt que l'idole d'un jour, na valait plus rien depuis que les tristes exigences de la politique l'avaient garotté.

Le monde est comme les enfants qui aiment à voir voler les oiseaux, mais qui les mettent en cage... ah, comme c'est triste!