Lijst van brieven op datum
2 oktober 1874
van
Stéphanie Omboni-Etzerodt (bio)
aan
E.J. Potgieter (bio)
Volledige Werken. Deel 17. Brieven en dokumenten uit de jaren 1874-1875 (1986)
2 oktober 1874
Brief van Stéphanie aan E.J. Potgieter. Twee dubbele velletjes en een enkel velletje postpapier, tot onderaan blz. 9 beschreven. (U.B. Amsterdam; fotokopie M.M.)
Padoue-le 2 Oct-74
Monsieur,
Confiant dans l'intérêt que vous a toujours inspiré cette famille si éprouvée, je reprends la plume pr. vous rendre compte de l'état des choses et des projets d'avenir de ces chers enfants.
Ils sont revenus samedi soir et je vous assure, dans ces circonstances douloureuses, cela a été une vraie consolation pr. ns. tous de nous trouver reunis. - Pauvres êtres! au milieu de leur consternation et de leur douleur, ils avaient encore fait ce qu'il y avait de mieux a faire. Ils ont cherché à s'oublier en quittant la scène du coup fatal qui venait de les frapper, et ne m'ayant point trouvée a Padoue ils sont allés trouver les anciennes connaissances de Milan, toujours promptes à les accueillir affectueusement. Naturellement ils étaient encore bien abattus, bien navrés et les premiers jours ont été remplis d'émotions et de souvenirs navrants. Maintenant nous commençons à reprendre un peu de sérénité en cultivant constamment la mémoire de cette tendre et noble âme, en cherchant à ns. inspirer en tout à ses desirs, et à nous y conformer, - Or, un de ces desirs, le plus constamment répété, sans pressentir, peutêtre, pauvre chérie! une fin aussi prochaine, était, que, dans le cas ou elle vint a manquer sa fille continuât ses études si brillamment commencées à Venise, afin de se créer un avenir indépendant; en la recommandant instamment à ne point consentir à aller vivre auprès de son père. Elle ne prévoyait que trop, la pauvre!, que le bonheur de son enfant ne se trouverait guère dans les conditions que pourrait lui offrir son père. Everdina elle-même est resolue, coûte qui coûte, à se conformer au voeu suprême de sa mère. Mais ici se présentent bien des difficultés; une, qui est celle de savoir sous quelle protection mettre une jeune fille de 17 ans, est déjà tout aplanie; une noble et sainte femme, digne en tous points d'accomplir la mission qu'elle entreprend, a déjà offert de la recevoir chez elle comme sa fille, en étendant sur elle sa protection maternelle pendant les quatres années qu'il lui faudrait encore pr achever ses études a l'Académie de Venise. - La marquise Paolucci est une dame veuve, qui a eu la douleur de perdre son mari il y a peu de temps et qui mène une vie très-retirée, tout consacrée aux soins et à l'education de deux charmants enfants. Une des personnes les plus estimées les plus vénérées du pays, et qui joint à ses autres mérites, celui d'avoir aimé et profondément apprécié Madme Dekker; c'est donc un élan de sympathie spontanée pour sa charmante fille qui lui a porté a faire cette offre généreuse, que je regarde comme une vraie bénédiction du ciel.
L'autre difficulté est encore plus grave; c'est l'opposition que pourra lui faire son père, en insistant pour la vouloir auprès de lui; ce qu'il a déjà fait du reste, mais sans savoir encore qu'elle était décidée à n' y point consentir; nous n'avons point encore de reponse à la lettre où elle lui annonce cette détermination. Or, j'espère qu'il finira par se rebuter du peu d'affection que sa fille, (qui se souvient trop de ses torts envers sa pauvre mère, pr. l'aimer,) lui porte, et par ne pas insister davantage - Mais dans le cas où il prétende s'armer de ses droits - voici ce que je voudrais savoir, - quelle ressource lui reste-t il? faire appel au consulat? a un tribunal? a un conseil de famille? - y a-t-il loi au monde qui permette à un père de contraindre sa fille à vivre avec sa concubine? je ne le crois pas possible.
Un mot, un avis de votre part ns. serait bien précieux, car vs. saurez ns. dire comment sont les lois hollandaises à ce sujet.
Pauvre chère enfant! elle est si charmante!, si intelligente!, remplie de talent et de bon sens!, aimée et admirée de tous! Au moment où ce cruel malheur l'a frappée elle venait d'achever la première année de ses études en emportant le premier prix de sa classe sur 89 concurrents!! C'était magnifique! tous les prof. de l'Académie sont d'accord à lui juger un talent exceptionnel.
Naturellement pr. le moment elle restera auprès de moi; l'école ne se rouvre qu'au mois de Nov., et en attendant ns. avons beaucoup de choses à faire pr. la mettre sur le pied où je voudrais qu'elle soit pr. entrer dans la maison de l'excellente dame Paolucci - Hélas! - il n'y a plus les doigts de fée de la pauvre mère pr. rafistoquer les vieilles hardes et faire de deux fils quatre. Quant à Edouard il est retourné à son office où il est depuis deux ans, et où il a toujours donné beaucoup de satisfaction. Aussi M. Blumenthal s'est il montré plein de coeur dans ces circonstances douloureuses, et il s'offre maintenant comme tuteur dans le cas que le père y consente. je vs. assure qu'entre lui et la Mse Paolucci, ces enfants seraient bien dignement et bien honorablement protégés.
En ce moment, Monsieur, on me remet votre lettre du 29 Sept. dans laquelle vs. me temoignez une confiance pr. laquelle je vs. suis bien reconnaissante.
En attendant, celle ci donne déjà réponse à la plupart des points qui vs. préoccupent, et dans la suite, je vs. tiendrais encore au courant du pli que prendront les choses. Dans le cas où M. Blumenthal soit nommé tuteur, il vous sera facile de vs. mettre en communication avec lui pr. realiser vos bonnes intentions envers les enfants. Edouard peut déjà suffire à lui-même, mais la jeune fille aura besoin d'etre aidée dans ses dépenses de toilette et dans celles que nécessiteront ses études. Reste à voir ce que fera le père. Il ne me reste plus qu'à vs. prier d'excuser les torts innegables du jeune homme à votre égard, et de les mettre sur le compte de l'etourderie naturelle à son âge, qui possède souvent des idées justes et des sentiments bien placés, mais qui ignore l'art et le devoir de les placer à propos la nécessité de les exprimer.
On promet plusieurs pubblications intéressantes sur Petrarque; jusqu'ici elles n'ont point encore parues; mais je les tiendrais en vue pr. vs. en rendre compte à la première occasion.
Mon mari se joint à moi pr. vs. présenter les salutations et l'expression de sa profonde estime.
En vs. serrant bien cordialement la main,
votre devouée
Stephanie Omboni